C'était l'été dernier.
À la sortie d'un film sur les
abeilles, que je n'avais pas trouvé génial mais qui montrait quand
même des images inquiétantes, je considère la pelouse, que je
tonds de moins en moins souvent et de plus en plus haut. Le trèfle
est fleuri et je vois qu'elles sont là au travail. Je repense à B.
me disant que dépenser de l'énergie pour couper de l'herbe est
stupide : ni économique ni écologique. Je pense au coin du
jardin que j'entretiens moins et qui me cause parfois de bonnes
surprises. C'est décidé : je ne vais plus la tondre. Très
vite, je comprends que je dois dire : Je ne fais plus de
pelouse. Bizarre en effet de parler d'une chose que l'on crée comme
si elle avait eu d'abord une existence propre. Même création de nos
prédécesseurs, tout laisse à penser que notre jardin avait d'abord
été, comme ceux alentour, un jardin potager. Mais en refaire un
n'était pas ma prétention.
Les premiers sentiments ont été
de nature opposée. Tout d'abord un grand soulagement : ça
m'énervait quand même, de devoir tondre la pelouse. Tout
d'un coup je pouvais regarder le jardin d'un autre œil. Me demander
si je devais y faire quelque chose et quoi. Le regarder était devenu
nouveau.
L'année précédente j'avais déjà
laissé pousser un mètre carré d'une herbe plus fine que l'autre,
pour voir. J'ai donc attendu, non sans une certaine crainte. Non pas
celle qu'on m'a suggéré, à savoir : Que vont dire les
voisins ? , mais celle des plantes elles-mêmes.
Qu'allaient-elles faire ? N'allaient-elles pas trop profiter de
cette liberté nouvelle, grandir et se multiplier jusqu'à nous
dépasser?
Les jours et les semaines ont
passé sans qu'aucune jungle ne se forme. L'herbe est restée de
l'herbe. Je me suis mis à sarcler les plates-bandes comme je faisais
auparavant, étonné même d'avoir plus de temps pour m'y consacrer.
J'ai continué à mettre certaines 'mauvaises herbes' dans le compost
et à en confier d'autres au ramassage municipal, mais lorsqu'il
s'est arrêté à l'automne, j'ai eu envie d'imiter M. et en ai fait
un tas au dessus du sol, sans entourage d'aucune sorte. Encore pour
voir ce que ça va donner.
Très vite j'ai été sûr de ne
plus vouloir voir la tondeuse et l'ai donnée à mes amis
récupérateurs. J'ai aimé la place laissée libre dans le garage.
Sans travailler davantage, j'ai pu nettoyer toutes les bordures à
fleurs et arbustes avant l'hiver, couper et entasser des branches.
Certes pour rester un peu maître, mais aussi je l'avoue pour que le
jardin reste beau : si ce n'est pas aux yeux des conformistes du
moins à ceux des esprits moins étroits et à ceux des gens qui
aiment les plantes de toutes sortes. Et en cette période où le
printemps s'annonce, je crois que c'est la première fois que tulipes
et jonquilles seront ainsi mises en valeur. Jusqu'à cette année, je
m'occupais d'abord de feu la pelouse.
L'an dernier j' y avais déjà bêché
deux carrés : un pour les plants de tomate qu'I. m'avait donnés
et un à la place du soi-disant composteur plastique dont je me suis
débarrassé. Je vais sans doute en créer un troisième. Mais c'est
surtout l'évolution future de la surface herbeuse qui excite ma
curiosité.
Post-Scriptum - au premier jour de l'automne 2015 :
Je n'ai pas compris tout de suite compris pourquoi ma dernière facture d'électricité avait très sensiblement baissé. Moins d'eau chaude? moins de télé ou de lumière artificielle? Ça m'a semblé curieux jusqu'à ce que je pense aux heures passées à tondre avec mon engin... électrique. Mais si vous abandonnez votre tondeuse à explosion vous économiserez aussi.
Et pendant que j'y suis, dernière surprise du jardin. L'an dernier I. m'avait donné à repiquer des plants de tomate qu'elle avait obtenu par semis. Ils avaient bien repris mais n'ont rien donné de mangeable, tous atteints du mildiou, jusqu'au dernier qui à pourri en place avec ses fruits gâtés. Là la force du vivant : j'y ai découvert cette année un paquet de sept plants provenant à n'en pas douter de la dernière tomate tombée. Séparés et repiqués ils ont tous bien poussé et commencé à donner des fruits. C'était hier la 2ème fois que je les taillais un peu et leur ajoutais des tuteurs plus grands. Les grappes sont maintenant nombreuses.
Pour être honnête, je dois dire que j'ai a nouveau remarqué 1 tache de mildiou sur 1 rejet. Même s'il finit par gagner le reste, étant donné les semaines de fortes pluies qu'on a eues, le progrès est indéniable. Ne pas oublier de sauvegarder des graines.
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